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Le Cénacle des treize

Les temps sont aux bouleversements et le monde connaît la crise de tout, même la crise de la crise, l'overdose d'une forme d'humanité sans partage qui desservit le bonheur. Alors que les conventions ne nous gardent plus la tête hors de l'eau, et que leurs renversements n'offrent qu'une page blanche de la colère, Le Cénacle des Treize oeuvre pour ce qui est de l'obligation d'un ordre/désordre des choses, pour le «moi» rimé à une altérité sans la prosodie d'aucune morale ou d' absolus. Nous partons de l'idée que si créer c'est superposer d'autres dimensions à la réalité, appeler à la vie par une disposition des mots, des couleurs ou des images ce qui gisait a priori dans les limbes, pourquoi ne pas répéter cet exercice, avec la même fougue mais en se regroupant ? Si la vraie poésie est d'abord question de versifier selon la ligne et dans la mesure de l'autre, joindre sa vie, la seule œuvre qui vaille, à un courant qui ne nous dépasse pas mais qui nous mène à une certaine vue des choses sans nuées, pourquoi ne pas se réunir pour l'édification de l'oeuvre magistrale, cet hymne qui n'est ni mystique ni métaphysique mais seulement humain ?

Le Cénacle des Treize, contre les impératifs, loin de toute loi qui transcende la création et qui modèle son expression, entend mettre en déroute tout discours castrateur, outil de répression du désir et de l'imagination. Parce que nous croyons tous fermement que créer est un acte d'amitié et que la voix plurielle, comme la main plurielle, est une mise en retraite d'un certain individualisme qui fructifie le vide, parce que nous croyons qu'une rature faite à plusieurs, dans les lieux de l'apprentissage du doute, finit par être une bonne gravure et qu'une balafre qui traverse plusieurs mains n'est plus une blessure, nous posons nos repères et nous construisons notre « héritage », puisque le poète [et l’artiste], comme l’a affirmé René Char « n’a pas de mémoire, Ce qu’on lui demande, c’est d’aller de l’avant »